lundi 27 mars 2006
Lucie au LSD
Ce roman possède la quatrième de couverture la plus étrange au monde. Derrière une photo d’échiquier géant, un texte. « A gauche, André est un homme de gauche, évidemment. A droite, André est un bourgeois de droite. A gauche comme à droite, un crime se prépare ». Voilà pour le synopsis. Puis, l’affaire se complique. « Supposons que gauche et droite aient fusionné, comme disons, les deux moitiés d’un cerveau. Serait-il alors possible que la moyenne des deux meurtres soit une lune de miel ? »
Ahurissement. Quelque chose m’échappe. Confusément, je devine qu’il se trame quelque chose avec les pages du roman, une histoire de direction. Gauche, droite, André, Lucie, trois parties dans le roman, Gauche, Droite, Ensemble. Puzzle.
C’est un exercice de style, je me dis. Bon. Je commence la partie qui s’appelle « Gauche » en ne lisant que les pages de gauche. C’est ça la clef du bouquin, je présume. Résultat : des dialogues qui frisent le surréalisme.
«-Aikido ?!
Il y avait dans l’intonation une tendresse infinie ».
Bon, c’est pas ça, me dis-je. Fatiguée d’errer dans les pages, je poursuis le bouquin.
Au turbin, au turbin !
Miracle : à la page 88, la partie « Ensemble » me révèle l’astuce. Complaisamment, Iegor Gran a fait le boulot à ma place. Il a fusionné les pages de gauche de la partie «Gauche » avec les pages de droite de celle de « Droite », pour construire l’histoire « Ensemble ». Et là, stupéfaction : ça marche.
André et Lucie, ce couple de bourgeois fatigués et prêts à se trucider mutuellement pendant les deux premières parties, atteignent le nirvana domestique dans la troisième. Non pas que comme personnages, ils aient autant de chair que George et Martha dans Qui a peur de Virginia Woolf. On est très loin aussi de l'épaisseur psychologique de la cruche normande Bovary et son Charlie à casquette...
...Il n’empêche : j’admire la virtuosité mathématique d’Iegor Gran. Ce petit fantaisiste a composé son roman en imbriquant des pages, des personnages, et a lié le tout par quelques astuces lexicales admirables. Les personnages changent de sexe selon les histoires, les bougres. C’est à s’y égarer, mais de plaisir. La langue est fleurie et sent bon son Raymond Queneau. Exemple: « Le vaisselier sourit : on parlait de lui».
Une petite mignardise, mon bon monsieur.
Iegor Gran, Les trois vies de Lucie, P.O.L.
16,50 euros.
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3 commentaires:
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Comment enlever les blog spams?
Quelle horreur....
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